Faciliter les formalités des sociétés dans l’UE à l’ère du numérique
Alors qu’il est souvent reproché aux organismes étatiques une lourdeur administrative entravant la vie des affaires, la directive européenne 2025/251 devrait améliorer la situation, notamment grâce au numérique, en favorisant l’interconnexion et l’interopérabilité des registres des sociétés au sein de l’UE. L’objectif est de favoriser ainsi les transactions et actes transfrontaliers tout en garantissant la fiabilité des données. En voici les principales mesures.
Sécuriser les informations sur les sociétés
Afin d’harmoniser les procéduresau sein de l’UE, il est instauré un principe général de contrôle ex-ante, administratif, judiciaire ou notarial en ce qui concerne l’acte constitutif et les statuts ainsi que leurs modifications ultérieures.
Par ailleurs, il est prévu une procédure de contrôle de la légalité des actes, tant au niveau du fond que de la forme.
Les autorités ad hoc pourront, en cas de doute, procéder à des vérifications complémentaires afin de s’assurer que la société peut encore être immatriculée. De plus, les autorités d’un État membre, pourront, en cas de soupçon d’abus ou de fraude, refuser sous motifs légitimes les justificatifs provenant d’un autre État membre en vue d’effectuer les formalités.
Si en France, les vérifications sont déjà opérées par le biais du guichet unique géré par l’INPI, ces mesures devraient permettre une uniformisation des contrôles au sein de l’UE, et de ce fait, une plus grande sécurité sur l’origine des informations transeuropéennes.
Un autre point doit être souligné : il s’agit de la mise à jour des informations relatives aux sociétés. En effet, il est souvent constaté des décalages importants entre la date effective de l’acte et celle du dépôt au registre, que ce retard soit dû par la société elle-même ou par les teneurs des registres. Aussi, les actes modificatifs des sociétés devront être déposés dans les 15 jours à compter de la date de l’acte. À ce titre, les États doivent prévoir des sanctions effectives et proportionnées en cas de défaut de publicité.
Par ailleurs, les registres doivent consigner les modifications effectuées, dans les 10 jours, sauf exception, à compter de la date d’achèvement des formalités requises.
Faciliter l’accès aux informations sur les sociétés
Afin de favoriser le marché intérieur européen, la directive met en place des mesures spécifiques qui devraient faciliter les échanges grâce à l’obtention d’information sur les partenaires commerciaux.
Les données concernant les sociétés seront rendues plus accessibles à travers le système européen d’interconnexion des registres du commerce (BRIS), des registres des bénéficiaires effectifs (BORIS) et des registres d’insolvabilité (IRI). Il est même prévu que l’information sur les succursales de pays tiers soient aussi mis à disposition du public grâce à ce système d’interconnexion des registres nationaux.
La directive améliore aussi l’information sur les sociétés commerciales de personnes (de type SNC ou commandite simple) et leurs représentants légaux. En effet, l’information portant sur ces dernières et l’identité exacte de leurs représentants devra être disponible dans tous les États membres grâce à l’interconnexion des registres.
Remarque : cette disposition ne doit pas conduire à enfreindre la règlementation RGPD sur les données personnelles. Aussi, les États membres doivent s’assurer que le système mis en place soit bien en adéquation avec l’objectif poursuivi.
Enfin, soulignons une volonté d’accroître l’information sur la structure des groupes consolidés. Bien que l’information puisse figurer dans les états financiers consolidés (indication du périmètre de consolidation, pourcentage de détention et méthode de consolidation), l’information sur la structure du groupe et sur l’appartenance de telle société à un groupe n’est pas aisée à trouver. Aussi, les États membres sont enjoints à mettre en place une procédure automatisée, à partir d’extraits des registres, permettant d’obtenir ces informations.
À ce titre, dans ses considérants, la directive recommande une représentation visuelle du groupe sur la base de la chaîne de contrôle au moyen du système d’interconnexion des registres nationaux.
Simplifier les formalités administratives
Il est souvent reproché une duplication des démarches pour l’inscription auprès des différentes autorités publiques. Aussi, la directive instaure le principe général « d’une fois pour toutes ». Pour ce faire, les autorités de différents États membres de l’UE auront accès aux informations grâce à l’interconnexion des registres. Ainsi, une société française qui voudrait créer une filiale dans un autre pays membre n’aura plus besoin de dupliquer et transmettre les mêmes informations au pays d’accueil.
La directive crée un certificat d’entreprise de l’UE, délivré par les registres nationaux et reconnu dans tous les États membres comme preuve de l’existence juridique d’une société.
Parallèlement, afin de connaître l’identité des personnes habilitées à représenter la société, une procuration numériques de l’UE est créée, valant moyen de preuve.
Les modèles de ces deux documents seront mis à disposition sur un portail dans toutes les langues officielles de l’UE.
En outre, afin de réduire les coûts liés à la traduction certifiée conforme de documents, celle-ci ne resterait nécessaire que dans des cas particuliers telle une procédure judiciaire.
Pour conclure
La maturité de l’exploitation des registres relatifs aux sociétés vis-à-vis du numérique étant disparate selon le pays, la nouvelle directive offre au moins une nouvelle base d’uniformisation des pratiques au sein de l’UE. Même si la directive ne mentionne que le numérique, il est légitime de penser que l’intelligence artificielle devrait s’inviter à la table pour accélérer le processus.
1 Directive UE 2025/25 du 19 décembre 2024 modifiant les directives UE 2009/102 et 2017/1132 en ce qui concerne l’extension et l’amélioration de l’utilisation des outils et processus numériques dans le domaine du droit des sociétés, avec une transposition par les Etats membres avant le 31 juillet 2027.

