Risques de marché & trésorerie (FX & IR) : comprendre pour agir
1. Qu’est-ce que le risque de taux?
Les entreprises sont exposées sur les taux d’intérêts lorsqu’elles ont des dettes à taux variables ou des actifs sensibles aux taux. Mais concrètement, votre entreprise est-elle exposée au risque de taux ?
Si vous avez une dette à taux variable ou des placements indexés sur un taux de marché, alors la réponse est oui…
Deux exemples pour mieux comprendre :
– Cas 1 – Une entreprise endettée :
L’entreprise finance un projet via un emprunt bancaire dont le taux est composé de l’EURIBOR + une marge bancaire. Si l’EURIBOR grimpe, le coût de la dette augmente immédiatement.
– Cas 2 – Une entreprise avec des placements :
L’entreprise décide de placer ses excédents de trésorerie en overnight, rémunérés à un taux indexé sur l’€STER (taux de référence du marché monétaire). Une baisse des taux réduit alors le rendement et donc le revenu financier.
Les notions clés à connaître :
– Taux court terme : fixé sur des périodes allant de 1 jour à 1 an, il représente le coût de l’argent pour les banques et les États sur le marché monétaire (ex : taux des bons du Trésor).
– Taux long terme : établi sur des durées supérieures à 1 an, il est déterminé par l’offre et la demande sur le marché obligataire (ex : obligation d’État 10 ans).
– Spread de taux : il s’agit de la différence entre deux taux, exprimée en points de base. Plus il est élevé, plus l’écart de rémunération entre deux actifs financiers est important.
Une variation de taux peut ainsi :
– Augmenter le coût de financement : Une hausse des taux accroît les intérêts à payer sur les dettes à taux variable.
– Réduire la rentabilité des placements : Les obligations et autres actifs à revenu fixe perdent en valeur lorsque les taux montent.
– Impacter la valorisation des actifs et passifs financiers : Les instruments financiers sensibles aux taux voient leur prix fluctuer.
2. Comment bien gérer son risque de change?
Pour commencer, cartographier les expositions
Pour ce faire, identifiez les flux en devises étrangères (ventes, achats, dettes, investissements) et qualifiez- les en leur donnant un volume et une fréquence / saisonnalité.
Puis définir une stratégie de couverture adaptée
En fonction de votre organisation (humaine, système…), déterminez des process adéquats permettant d’atteindre et de suivre votre taux de couverture cible. Dans votre stratégie de couverture, pensez également à définir les instruments autorisés (forwards, options, swaps…).
Exécuter la stratégie de façon systématique
Une fois la stratégie de couverture établie, vos équipes ont leur fil rouge pour gérer le risque de change. De votre côté, assurez-vous qu’une séparation des tâches (le fameux process front to back) est respectée.
Suivre et ajuster ensuite la performance des couvertures
Analysez régulièrement l’évolution des expositions et leur impact sur le P&L et la trésorerie (net des couvertures). Pour ce faire, mettez en place un reporting FX simple que vous pourrez actualiser rapidement tous les mois
Et enfin comptabiliser les couvertures
Pour vous assurer de la correcte comptabilisation de vos couvertures, déterminez dans quel référentiel vous souhaitez les comptabiliser (french gaap, IFRS…) et déterminez leur classification (CFH ou FVH)
Un pilotage méthodique du risque FX permettra de protéger la rentabilité, de maîtriser la volatilité et d’optimiser la génération de cash.
3. Cartographier le risque de change, un vrai travail d’enquêteur
Pour cartographier le risque de change d’une société, il faut mener une véritable enquête de terrain : aller voir les opérationnels et décrypter le business model pour comprendre les flux. Voici les 3 étapes pour une cartographie efficace :
1. Analyser les impacts comptables
Commencez par analyser le résultat de change en P&L entité par entité. Cela permet d’identifier celles qui sont exposées… cette vision est rétrospective ! Elle ne vous dira rien sur les risques futurs.
2. Focus sur les flux commerciaux : achats & ventes
Le risque de change trouve souvent son origine dans les flux opérationnels. Il faut donc discuter avec les équipes achats et commerciales pour identifier les devises utilisées et identifier les expositions.
3. Ne pas oublier les flux hors exploitation
CAPEX en devises, flux intercos et opérations financières sont parfois oubliés de la cartographie alors qu’il s’agit des flux sur lesquels les corpo ont la plus grande visibilité et donc ceux qui seront couverts le plus simplement et avec un maximum d’efficacité.
Une fois toutes ces données collectées, l’enjeu est double : rendre la cartographie la plus claire possible et quantifier l’exposition. Car une bonne visualisation facilite la communication et aide à la prise de décision.
4. Quel instrument choisir pour une couverture au risque de taux efficace ?
Fin février 2025, les taux euros ont été marqués par les tensions sur le conflit Ukraine-Russie et une possible augmentation des dépenses militaires en Europe. Les swap 10Y ont augmenté à 2.49% (vs 2.39% en début de mois) et à 2.42% pour le swap 7Y (vs 2.34% en début de mois). Dans un tel contexte de volatilité, maîtriser les instruments de couverture est essentiel pour protéger son exposition à l’évolution des taux. Voici les principaux outils à connaître :
Cap : un Cap est un contrat de gré à gré entre deux contreparties permettant à un emprunteur à taux variable de se couvrir contre une hausse des taux au-delà d’un certain niveau en échange du paiement d’une prime auprès du vendeur.
Objectif : Pour un emprunteur, permet de garantir un taux d’emprunt maximum.
Floor : un Floor est un contrat de gré à gré entre deux contreparties permettant à un prêteur à taux variable de se couvrir contre une baisse des taux monétaires au-delà d’un certain niveau en échange d’une prime qu’il doit verser au vendeur.
Objectif : Pour un prêteur, permet de garantir un taux de placement minimum.
Tunnel : Opération simultanée d’achat d’un CAP et de vente d’un FLOOR (cas d’un Tunnel emprunteur) ou d’achat d’un FLOOR et de vente d’un CAP (cas d’un Tunnel prêteur). Dans les deux cas, le CAP et le FLOOR doivent avoir les mêmes caractéristiques (montant, durées, taux variable de référence).
Objectif : Limiter le taux d’intérêt minimal et maximal en même temps.
Swap de taux : un swap de taux d’intérêt est un contrat à terme dans lequel un flux de paiements d’intérêts futurs est échangé contre un autre sur la base d’un montant principal spécifié.
Objectif : Supprimer le risque d’évolution du taux variable.
Pourquoi une politique de couverture est essentielle ?
Dans un environnement incertain, mettre en place une stratégie de couverture du risque de taux est indispensable pour protéger sa trésorerie et sécuriser ses marges.
5. Cap sur l’exposition au risque de change
Existe t-il un instrument pour couvrir efficacement une exposition au risque de change ? Il n’y a pas de réponse claire car, cela dépend ! Fin février 2025 par exemple, le cours EUR/USD a fluctué en lien avec des incertitudes géopolitiques, notamment sur l’issue de la guerre en Ukraine. Après avoir oscillé entre 1.0402 et 1.0504, il a atteint son plus haut niveau du mois à 1.0528 ce lundi.
Cela peut paraitre peu, mais pour les entreprise exposées, cela a un impact direct sur leur marge.
Dans ce contexte connaitre et comprendre les instruments de couverture est essentiel pour protéger sa rentabilité. Voici les principaux outils à connaître :
FX Spot : Sécuriser un besoin en devise immédiat
Le FX Spot consiste à acheter une devise contre une autre à un cours prédéterminé (cours du marché), avec un règlement en J+2. Il est utilisé quand la devise étrangère est déjà encaissé et vient stopper l’exposition.
FX Forward : Se prémunir contre les variations futures
Le FX Forward permet d’acheter ou de vendre une devise à un cours prédéterminé et à une date future donnée. Il est utilisé pour couvrir des opérations futures ayant une probabilité de réalisation élevée
Exemple : Une entreprise française doit payer 1 MUSD à un fournisseur américain dans 3 mois.
FX Swap : Gérer les flux de trésorerie en devises
Le FX Swap permet d’acheter et de vendre simultanément un montant en devise à deux dates différentes (ex. achat immédiat et revente ultérieure). Il est souvent utilisé pour couvrir de l’endettement ou pour ajuster la maturité d’un FX forward.
Option de change : Flexibilité et protection
L’option de change donne le droit, mais non l’obligation, d’acheter ou vendre une devise à un cours défini, moyennant une prime. Par exemple, lorsqu’une entreprise française doit payer 1 MUSD à un fournisseur américain dans 6 mois. Le risque est alors celui-ci : si le dollar s’apprécie (ex. 1 EUR = 1.03 USD), le paiement « coûtera plus cher » en contrevaleur euro.
La solution alors est que l’entreprise achète une option d’achat d’USD à 1.04 EUR/USD, moyennant une prime.
Voici les scénarios :
– Si le taux passe à 1.02, elle exerce son option et limite ses pertes.
– Si le taux monte à 1.08, elle ne l’exerce pas et bénéficie du cours du marché.
Vous souhaitez optimiser votre risque de taux ou mieux gérer votre risque de change, n’hésitez pas à contacter l’équipe directement : Cécile Dobras, Vincent Kerbiriou, Simon Wicker