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Audit légal et contractuel, Lettre d'Actualités Techniques

État des lieux du marché de l’audit (rapport de la H2A)

En vertu des pouvoirs qui lui sont conférés, la H2A assure le suivi du marché national du contrôle légal des comptes. À ce titre, elle vient de publier un nouveau rapport1 qui met en exergue le fait que le marché français reste relativement ouvert, mis à part le marché des entités d’intérêt public (EIP) où les cinq principaux réseaux d’audit se partagent essentiellement le marché. Dans ce rapport, elle insiste aussi sur le rôle primordial des comités d’audit dans la recherche de la qualité du contrôle légal et de la diversité des acteurs, notamment grâce aux co-commissariat aux comptes.

Marché actuel de l’audit légal national et des services autres que l’audit

Bien que le nombre d’entités concernées par le contrôle légal ait subi une baisse de plus de 15 % entre 2021 et 2024, principalement en raison de la loi PACTE qui a relevé les seuils de désignation obligatoire, le nombre de commissaires aux comptes se stabilise durant cette période, avec, notons-le, une progression de l’exercice professionnel sous forme de sociétés de commissaires aux comptes (+7,6%).

Alors que pour les non-EIP le marché reste relativement ouvert, sa concentration est forte pour les EIP puisque cinq réseaux bénéficient de 88,4% des honoraires (avec une certaine disparité selon les secteurs : 91,9 % dans le secteur bancaire contre 56,2 % dans le secteur assurances et mutuelles). Le rapport de la H2A souligne que l’exercice collégial en co-commissariat aux comptes qui, au-delà de faire bénéficier de compétences et d’expertises plus nombreuses et de garantir la continuité des services, favorise la diversité des offres et limite la concentration du marché, ne représente qu’environ 10 % des mandats.

Enfin, si le marché des travaux de certification légale représentant 2.689 millions d’euros au total, en légère progression par rapport à 2021 (+ 7,9 %), l’augmentation est nettement plus forte pour les honoraires de services autres que l’audit : + 24,3 % entre 2021 et 2024. Enfin, soulignons le rôle important des comités d’audit puisque leurs travaux couvrent la gouvernance, la sélection des commissaires aux comptes, le suivi de leurs travaux d’audit et le contrôle de leur indépendance y compris pour ce qui concerne la fourniture de services autres que l’audit. Pour les sociétés soumises à l’obligation de publier un rapport de durabilité, un comité spécialisé, le plus souvent le comité RSE, joue un rôle analogue.

Marché des EIP : rôle des comités d’audit

Au fil des ans, ces comités sont montés en compétence et au moins la moitié de leurs membres possèdent une expertise en information financière. En interaction avec les organes d’administration ou de surveillance, avec une fréquence de 5 à 6 réunions annuelles spécifiques, le temps consacré aux questions ayant trait à l’audit varie selon les sociétés, mais 14 % de ces comités déclarent attribuer plus de la moitié de leur temps d’échange sur ce sujet.

En ce qui concerne la sélection des auditeurs par appels d’offres, une implication forte des comités est soulignée avec une attention croissante portée à la qualité des cabinets proposés et à la transparence des critères de sélection. La H2A estime cependant que les efforts doivent être poursuivis notamment en termes de recommandations en vue de la désignation des auditeurs (44 % recommandent deux auditeurs comme l’exige la réglementation) et d’exploitation des rapports de contrôle qualité de la H2A (peu de comités les demandent et les utilisent).

En ce qui concerne le suivi des travaux d’audit, le rapport complémentaire élaboré par les contrôleurs légaux à destination des comités d’audit constitue, pour la plupart de ces comités, une bonne base de travail pour la gestion des risques et l’appréciation du contrôle interne. Toutefois, la H2A regrette que les commissaires aux comptes ne soient pas assez challengés par une analyse critique de la part des comités d’audit.

Quant au rôle de garant de l’indépendance des auditeurs, les dispositifs mis en place sont perfectibles selon la H2A. En effet, si près de 80 % des comités obtiennent une déclaration écrite annuelle d’indépendance de leurs auditeurs, seule une minorité (15 %) engage de véritables discussions sur les menaces potentielles et les garanties à apporter. En outre, l’approbation des services autres que l’audit légal reste imparfaite : 30 % des comités élaborent une liste de prestations préapprouvées, mais l’application effective est encore lacunaire. D’autres comités mettent en place des seuils d’examen, alors que cette pratique n’est pas prévue par la réglementation. À ce titre, La H2A regrette que les dispositions légales régissant l’approbation des services autres que l’audit par ces comités restent finalement peu appréhendées. Elle déplore le fait que les comités d’audit ne se sont pas pleinement emparés du dispositif d’examen de ces services et que, trop souvent, la décision repose sur la direction de l’entité ou les déclarations des contrôleurs légaux.

Pour une diversité dans le contrôle légal des comptes

Face à ces constats, la H2A émet des recommandations, notamment pour soutenir la qualité de l’audit et diversifier le marché des EIP. Ainsi, elle invite les comités d’audit à :

  • veiller à la présence, avec une pondération suffisante, de la qualité de l’audit parmi les critères de sélection des commissaires aux comptes ;
  • encourager et considérer avec intérêt les candidatures des cabinets d’audit n’appartenant pas aux plus grands réseaux ;
  • Recommander, comme le prévoient les textes européens, plusieurs candidats en vue de la désignation des commissaires aux comptes par l’assemblée générale, en émettant une préférence.

La Haute Autorité recommande également aux comités d’audit :

  • de développer une approche critique vis-à-vis des travaux des contrôleurs légaux, afin de contribuer à la qualité de ces derniers ;
  • de prendre connaissance des rapports de contrôle qualité de la H2A, tant au moment du choix des commissaires aux comptes, qu’au cours de leur mandat, afin de favoriser la mise en œuvre des recommandations adressées par la H2A aux cabinets à l’issue des contrôles.

Pour conclure

Ce dernier rapport ne marque pas de points de rupture, il s’inscrit dans le prolongement des précédents rapports. Comme auparavant, la H2A est vigilante sur les risques de concentration du marché et prône une diversité des acteurs. Si certains pays européens n’ont pas retenu l’obligation d’un co-commissariat aux comptes, la H2A estime qu’il s’agit d’un dispositif utile et efficace pour freiner la concentration excessive et atténuer les conséquences d’une éventuelle défaillance d’un acteur du marché.

1 H2A, rapport triennal de suivi du marché du contrôle légal des comptes, juillet 2025.