Mécénat et parrainage : suivez le guide ! (de l’AFA)
Le 26 mars 2024, l’AFA (Agence Française Anticorruption) a publié la version finalisée du guide pratique « Sécuriser les opérations de parrainage et de mécénat des entreprises ». Ce guide vise à mettre en lumière les mesures de prévention et de détection à mettre en œuvre pour réaliser des opérations de parrainage ou de mécénat en pleine conformité avec la loi.
Identification des risques et des moyens pour les atténuer
Rappelons, en préambule, que le mécénat se traduit par un soutien matériel ou financier, apporté à une œuvre ou à une personne morale pour l’exercice d’activités présentant un intérêt général sans contrepartie de la part du bénéficiaire. Si la pratique du parrainage (on parle aussi de sponsoring) consiste, comme pour le mécénat, en un soutien à une action, un projet ou un organisme, elle s’en différencie par le bénéfice direct de notoriété que cherche à en retirer l’entreprise.
Le guide rappelle que certaines opérations de mécénat ou de parrainage peuvent avoir pour objet de dissimuler un avantage indu dans le cadre d’un schéma corruptif. Plusieurs affaires récentes ont montré que les scénarios de risques impliquant des opérations de mécénat et de parrainage ne relèvent pas de la fiction. Le guide présente plusieurs exemples de risques pour chaque type d’infractions pénales d’atteintes à la probité (corruption, trafic d’influence, détournements de fonds ou de biens publics, prise illégale d’intérêts, concussion, favoritisme, recel ou complicité de blanchiment d’une des infractions précédentes). L’AFA présente ainsi l’exemple du directeur des achats informatiques d’une entreprise qui sollicite auprès du directeur commercial d’une entreprise d’informatique l’attribution d’un mécénat au bénéfice de l’association qu’il préside en contrepartie de l’attribution d’un contrat de maintenance informatique (risque de corruption).
Surtout, le guide met en avant 12 bonnes pratiques à mettre en œuvre pour sécuriser ce type d’opérations. Comme à son habitude, l’AFA indique que les bonnes pratiques figurant dans ce guide ne revêtent aucun caractère contraignant. Il convient toutefois de s’en approcher puisque, dans les faits, nous constatons que, lors de ses contrôles, l’AFA s’attend à ce que ses préconisations soient appliquées (dans une approche « comply or explain »).
Maîtriser les risques en 4 étapes : cartographier / prévenir / encadrer / contrôler
1 – Prenez en compte les opérations de mécénat et de parrainage dans votre cartographie des risques de corruption
Pour réussir à maîtriser un risque, il faut d’abord l’appréhender correctement. Il convient donc d’identifier les opérations de mécénat et de parrainage en tant qu’avantages indus dans les scénarios de corruption (au même titre que l’octroi de cadeaux, la prise en charge d’hospitalités etc.). Les illustrations figurant dans le guide pratique pourront vous inspirer.
2 – Cherchez à prévenir et gérer les conflits d’intérêts
Comme les illustrations mises en avant par l’AFA tendent à le prouver, les risques de corruption impliquant une opération de mécénat ou de parrainage naissent majoritairement de situations de conflits d’intérêts. Aussi, est-il préconisé de déployer des procédures pour prévenir et gérer les conflits d’intérêts, par exemple en instaurant :
- une obligation de déclaration de conflits d’intérêts, et ;
- une procédure de déport (exemple : je m’abstiens de participer au dépouillement des offres des prestataires en lice dont l’un d’entre eux est détenu par mon cousin).
3 – Encadrez les opérations de parrainage et de mécénat par des règles en matière d’instruction, de validation et de documentation
Afin de limiter les risques que ces opérations peuvent engendrer, l’AFA suggère de :
- désigner un responsable de l’instruction et du suivi des dossiers de parrainage et de mécénat indépendant (c’est-à-dire n’intervenant pas dans la prise de décision),
- faire en sorte que la prise de décision soit collégiale (on pourra définir un workflow de validation spécifique pour ce type d’opérations),
- rendre obligatoire la formalisation systématique d’une convention de parrainage ou de mécénat définissant les obligations respectives des parties et leur engagement en matière de lutte contre la corruption,
- procéder à l’évaluation des organismes bénéficiaires au regard des risques d’atteinte à la probité (en amont).
4 – Contrôlez l’application des règles définies
Il convient de contrôler la correcte application des procédures, en s’appuyant notamment sur les opérations comptables. Ainsi, en premier niveau, il peut être demandé :
- au responsable de l’opération, de s’assurer que l’organisme bénéficiaire a bien fait l’objet d’une évaluation ;
- au département comptable, de s’assurer – au moment de l’enregistrement en comptabilité – que l’opération a été dûment validée et a fait l’objet d’une convention.
En deuxième niveau, a posteriori, on pourra s’assurer de l’application des contrôles précédents et procéder à la vérification de la réalité des contreparties obtenues pour les opérations de parrainage.
Pour rappel, l’AFA s’attend à ce que les contrôles soient décrits dans un document précisant le périmètre de ces contrôles, les responsables et les fréquences de leur mise en œuvre, les modalités d’échantillonnage appliquées, la façon de les matérialiser et la manière d’en restituer les résultats.
Pour conclure
Pour s’assurer que les opérations de parrainage et de mécénat ne soient pas détournées de leur objet initial dans une intention frauduleuse, et soient ainsi requalifiées pénalement, les entreprises ont tout intérêt à les encadrer par des règles claires, diffusées et contrôlées. À ce titre, on veillera à déployer des dispositifs proportionnés aux niveaux de criticité mesurés dans la cartographie, en fonction notamment de la fréquence et de l’importance de ce type d’opérations, mais également des géographies concernées.